La pyrolyse plasma du méthane au service de la transition énergétique

Transition écologique Décryptage
Publié le 24 avril 2024
La recherche Mines Paris – PSL il se consacre depuis de nombreuses années à l’étude de la pyrolyse plasma du gaz naturel à très haute température pour la coproduction d’hydrogène et de noirs de carbone. Le principal avantage de cette méthode réside dans la coproduction de deux produits industriels majeurs : l’hydrogène et le noir de carbone avec une empreinte carbone et une consommation énergétique nettement inférieure à celle des procédés existants.

Ces recherches, menées en collaboration avec la société américaine Monolith, prennent aujourd’hui une nouvelle dimension avec la signature d’un nouvel accord-cadre encore plus ambitieux entre l’entreprise américaine et Mines Paris – PSL. Elles suscitent aujourd’hui un intérêt majeur, dans la perspective d’une nécessaire transition vers une décarbonation massive de l’énergie. Cette alliance revêt une importance capitale dans un contexte de nécessité de réduction massive des émissions de CO₂.

 

Une collaboration fructueuse avec Monolith

Monolith, fondée par deux jeunes entrepreneurs de la Silicon Valley en 2012, s’est rapidement intéressée à la pyrolyse du gaz pour la production de carbone et d’hydrogène. À la recherche de partenaires experts, ils se sont tournés vers les équipes de Mines Paris – PSL, une des deux équipes dans le monde – avec une équipe Norvégienne – à avoir travaillé sur cette technologie de rupture depuis environ une vingtaine d’année. Cette collaboration a conduit à la signature d’un premier accord-cadre et de plusieurs contrats successifs qui ont accompagné la montée en puissance de Monolith aux États-Unis ; le procédé étant désormais en phase de développement industriel sur le territoire américain. Cette alliance revêt une importance capitale dans un contexte de nécessité de réduction massive des émissions de CO₂.

Image par microscopie électronique à transmission (MET) d’un agrégat caractéristique de noir de carbone et représentation schématique de la section d’une particule primaire (d’après Donnet [1]).

 

La pyrolyse plasma : vers une révolution énergétique

Le procédé développé repose sur la pyrolyse du méthane par plasma thermique, où celui-ci est soumis à des températures très élevées, cassant la molécule pour produire du carbone solide nanostructuré et de l’hydrogène gazeux. Cette coproduction offre des opportunités économiques majeures, le noir carbone (un des 50 produits chimiques les plus importants dans le monde) étant utilisé dans diverses applications industrielles à forte valeur ajoutée : pneumatiques, polymères techniques, piles et batteries…  L’hydrogène peut être utilisé dans la chimie – notamment pour la production d’ammoniac – ou comme vecteur d’énergie propre. Ce nouveau procédé représente un pas décisif vers la production d’hydrogène décarboné à des coûts de production de l’ordre de 2$ par kg.

Principales applications du noir de carbone représentées par chiffre d’affaires sectoriel (production mondiale : 12 millions de tonnes par an).

 

Des perspectives mondiales

Si aux États-Unis le contexte législatif favorable, avec l’entrée en vigueur de l’« Inflation Reduction Act » récemment adopté sous l’impulsion du Président Joe Biden, et l’abondance des ressources en gaz naturel favorisent le développement rapide de cette technologie, l’Europe fait face à des défis différents. Malgré les perturbations géopolitiques liées à la guerre entre la Russie et l’Ukraine et les tensions dans la fourniture de gaz naturel, le développement rapide du biogaz, l’urgence climatique et la nécessité de décarboner l’énergie placent l’hydrogène au cœur des enjeux énergétiques mondiaux et pourraient offrir un terrain propice au déploiement de cette technologie en Europe.

Vue de la zone plasma : électrodes (photo ©Laurent Fulcheri).

 

Vers un avenir énergétique « turquoise »

Face aux défis environnementaux pressants et aux impératifs de réduction des émissions de CO₂, l’hydrogène « turquoise » se présente comme une alternative prometteuse. En offrant une voie intermédiaire entre les méthodes de production traditionnelles émettrices de CO₂ et les solutions émergentes telles que l’électrolyse de l’eau très énergivore, la pyrolyse du gaz ouvre de nouvelles perspectives pour une transition énergétique durable. Ce partenariat entre Mines Paris – PSL et Monolith symbolise un pas de géant vers un avenir énergétique plus propre, plus efficace et plus durable.

 

Pour aller plus loin

  • Laurent FULCHERI, « Production d’hydrogène « turquoise » par pyrolyse du méthane », Annales des Mines, Réalités industrielles – Hydrogène et décarbonation, nov. 2022, p. 125.
  • J. Diab et. al, Why Turquoise Hydrogen Will Be a Game Changer for The Energy Transition, International Journal of Hydrogen Energy, Volume 47, Issue 61, 19 July 2022, Pages 25831-25848.

 

Site internet Monolith

 


À propos de Laurent Fulcheri

Après une thèse au CNRS, Laurent Fulcheri rejoint l’École en 1989 où il crée une nouvelle équipe de recherche sur les « Procédés Plasma » au sein du CENERG, aujourd’hui Centre PERSEE, un acteur majeur de la transition énergétique et écologique. Directeur de recherche à Mines Paris – PSL, il se consacre depuis de nombreuses années à l’étude de la pyrolyse plasma du gaz naturel à très haute température pour la coproduction d’hydrogène et de noirs de carbone, menée en collaboration avec la société américaine Monolith.

 

 


À propos du Carnot M.I.N.E.S

Le Centre PERSEE de Mines Paris-PSL est membre du Carnot M.I.N.E.S.
Le label, créé en 2006, est un label d’excellence décerné par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche à des établissements de recherche en France. Il est destiné à favoriser la recherche partenariale, c’est-à-dire la conduite de travaux de recherche menés par des laboratoires publics en partenariat avec des entreprises notamment. Ces instituts favorisent le passage de la recherche à l’innovation et d’accroître le transfert de technologies vers les acteurs économiques.

Site internet Carnot M.I.N.E.S.

 


[1] Donnet JB, Bansal RP,Wang MJ. In: Carbon Black, Science and Technology, 2nd ed, New York: Marcel Dekker, 1993.

 

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